Les traumatismes psychologiques laissent une empreinte durable, aussi bien sur le cerveau que sur lâensemble du corps. Les rĂ©centes avancĂ©es scientifiques montrent que lâimpact du trauma dĂ©passe largement le domaine psychiqueâŻ: il sâinscrit dans notre biologie profonde, modifiant jusquâĂ lâexpression de certains gĂšnes.
Quand un individu vit un Ă©vĂ©nement traumatique, ce nâest pas uniquement lâesprit qui conserve une trace de cette expĂ©rience : le cerveau et le corps tout entier enregistrent aussi, au niveau cellulaire, cette souffrance. Les neurosciences et la neuro-imagerie ont permis de mettre en lumiĂšre les effets prĂ©cis du trauma sur diffĂ©rents organes et fonctions :
L’Effet du Traumatisme sur le cerveau et le corps
Lâhippocampe, centre de la mĂ©moire et de lâorientation temporelle, voit son volume diminuer et son activitĂ© rĂ©duite. Cette altĂ©ration rend les souvenirs du trauma fragmentĂ©s, brouille la frontiĂšre entre passĂ© et prĂ©sent, et peut provoquer de lâamnĂ©sie liĂ©e Ă lâĂ©vĂ©nement. Le cortex prĂ©frontal, chargĂ© du raisonnement, de la prise de recul et de la rĂ©gulation Ă©motionnelle, perd en efficacitĂ©. La personne a alors plus de mal Ă mettre les choses en perspective, Ă contrĂŽler ses rĂ©actions Ă©motionnelles et Ă planifier ses actions.
Au niveau cĂ©rĂ©bral, le traumatisme entraĂźne une hyperactivitĂ© de lâamygdale, zone clĂ© de la gestion des Ă©motions et de la peur. Cet emballement explique la persistance de lâanxiĂ©tĂ©, lâhypervigilance, le sentiment de danger permanent et les flashbacks que lâon peut encore vivre longtemps aprĂšs lâĂ©vĂ©nement.Â
Sur le plan hormonal et corporel, les mĂ©canismes rĂ©flexes de dĂ©fense (fuite, combat, inhibition) dĂ©clenchent la sĂ©crĂ©tion massive de cortisol et dâadrĂ©naline, hormones du stress. Ă long terme, cette dĂ©charge hormonale dĂ©rĂšgle le sommeil, favorise la fatigue chronique, fragilise le systĂšme immunitaire et expose la personne Ă des douleurs diffuses, voire Ă des maladies inflammatoires. Le systĂšme nerveux reste en Ă©tat dâalerte perpĂ©tuel. MĂȘme en dehors de tout danger rĂ©el, on observe de lâirritabilitĂ©, des troubles digestifs, des variations dâappĂ©tit, des palpitations et dâautres manifestations somatiques inhabituelles. Sur la durĂ©e, il existe Ă©galement un risque accru de comportements auto-destructeurs (addictions, automĂ©dication, isolement, violences) et de maladies cardiovasculaires ou mĂ©taboliques.
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L’impact du Trauma sur l’Expression gĂ©nĂ©tique et la TransmissionÂ
Les dĂ©couvertes de ces derniĂšres annĂ©es dĂ©montrent que le trauma laisse dans lâorganisme une vĂ©ritable trace biologique. Par le phĂ©nomĂšne de mĂ©thylation*, lâexpression de certains gĂšnes, notamment liĂ©s Ă la gestion du stress, peut ĂȘtre modifiĂ©e. Cette marque biologique rend la personne plus vulnĂ©rable Ă lâanxiĂ©tĂ© ou Ă la dĂ©pression, parfois bien aprĂšs lâĂ©vĂ©nement.Â
La science montre aujourdâhui quâau-delĂ du simple vĂ©cu psychologique, le traumatisme sâincarne dans la matiĂšre mĂȘme du corps, influant sur la santĂ© globale et parfois celle de la descendance. Une personne ayant subi de graves violences peut prĂ©senter une modification gĂ©nĂ©tique qui fragilise durablement sa rĂ©ponse au stress Ă lâĂąge adulte. Les enfants de victimes de drames ou dâabus montrent parfois des signes de stress ou dâanxiĂ©tĂ© directement corrĂ©lĂ©s Ă des changements dans leur ADN.
La transmission du trauma ne sâarrĂȘte pas Ă la gĂ©nĂ©tique. Elle sâopĂšre aussi par lâapprentissage familial : un manque de tendresse, la peur, la violence ou les secrets sont autant dâimpressions laissĂ©es dans la psychĂ© et pouvant se perpĂ©tuer Ă lâĂąge adulte.
Transmission Transgénérationnelle : Héritage silencieux du Trauma
Les Ă©vĂ©nements traumatisants comme le stress chronique ou les chocs de vie majeurs peuvent induire des modifications Ă©pigĂ©nĂ©tiques. Ces derniĂšres modifient la façon dont sâexpriment les gĂšnes liĂ©s Ă la gestion du stress, de lâhumeur ou du comportement, ce qui favorise la vulnĂ©rabilitĂ© des descendants. Prendre soin de ses propres blessures, câest donc aussi se donner la chance dâinterrompre la chaĂźne et dâoffrir rĂ©paration aux gĂ©nĂ©rations futures.
Les preuves scientifiques abondent :
- Des études chez les survivants de la Shoah et leurs enfants montrent des changements épigénétiques, comme la déméthylation du gÚne FKBP** associés à un risque accru de troubles liés au stress.
- Les vĂ©tĂ©rans souffrant de syndrome post-traumatique prĂ©sentent des schĂ©mas de mĂ©thylation* diffĂ©rents dans lâADN de leur sperme, corrĂ©lĂ©s Ă des problĂšmes mentaux chez leurs enfants.
- Des expĂ©riences animales sur la souris rĂ©vĂšlent que le stress maternel ou la peur conditionnĂ©e peuvent, sur plusieurs gĂ©nĂ©rations, provoquer des modifications comportementales et gĂ©nĂ©tiques, mĂȘme sans exposition directe des descendants au traumatisme initial.
Cas Pratique : Quand le corps fait entendre la voix du Trauma
Lors dâune sĂ©ance de kinĂ©siologie, jâai accompagnĂ© une femme portant les stigmates de nombreux traumatismesâŻ: manque dâaffection, violences familiales et sexuelles subies dans lâenfance, tues par peur de nâĂȘtre pas crue. Pour Ă©chapper Ă ce climat, elle sâest mariĂ©e trĂšs jeune, sans parvenir Ă trouver le bonheur, et une fois adulte, elle nâa pas rĂ©ussi Ă offrir Ă ses enfants lâamour et la sĂ©curitĂ© Ă©motionnelle qui lui avaient manquĂ©. La violence subie sâest parfois, bien quâattĂ©nuĂ©e, retrouvĂ©e dans sa propre façon de materner et les secrets ont continuĂ© de peser sur la dynamique familiale. La perte tragique de sa mĂšre, par suicide alors quâelle-mĂȘme devenait maman, a accentuĂ© les traumatismes dĂ©jĂ prĂ©sents.
Aujourdâhui, lâun de ses enfants traverse une phase de dĂ©tresse profonde, marquĂ©e par des addictions et de la souffrance Ă©motionnelle ; son comportement met en pĂ©ril sa vie, celle de ses proches et mĂȘme celle dâautrui.
Conclusion :
Les traumatismes laissent une marque profonde : ils modifient le cerveau, fragilisent le corps, et peuvent, sans qu’on le rĂ©alise, façonner la vie des gĂ©nĂ©rations futures.
Comprendre ce phĂ©nomĂšne, c’est donner du sens au chemin de soin et d’Ă©volution personnelle pour nous, nos enfants et nos petits-enfants.
La KinĂ©siologie offre une approche douce et efficace pour libĂ©rer les traumatismes inscrits dans le corps et l’inconscient. Par le test musculaire et l’Ă©coute corporelle, elle permet d‘identifier l’origine des blocages Ă©motionnels et aide Ă dissoudre les schĂ©mas rĂ©pĂ©titifs, souvent transmis de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration.
En retrouvant un équilibre intérieur, chacun peut se délester du poids du passé, renouer avec sa vitalité et sa force intérieur et contribuer à un nouvel héritage familial, plus apaisé.
Lexique :
* La mĂ©thylation est une modification chimique de lâADN : elle rĂ©gule lâexpression des gĂšnes, sans changer la sĂ©quence. InfluencĂ©e par lâenvironnement ou lâexpĂ©rience, elle peut âactiverâ ou âdĂ©sactiverâ certains gĂšnes et explique pourquoi des traumatismes peuvent ĂȘtre transmis de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration.
** Les gÚnes FKBP codent des protéines qui agissent comme des « chaperons moléculaires », sont centrales dans la régulation du stress biologique, la plasticité cellulaire et certaines réponses immunitaires ou hormonales
Tous les faits avancĂ©s dans cet article sont issus de travaux de recherche, de publications scientifiques ou d’expĂ©riences largement relayĂ©es dans la littĂ©rature spĂ©cialisĂ©e.
Liste principales des sources :
1. Troubles du stress post-traumatique · Inserm, La science pour la santé
2. Comment les traumatismes se transmettent à travers les générations | Pour la Science
3. Comment les traumatismes se transmettent à travers les générations | Cerveau & Psycho
4. Stress post-traumatique : les mĂ©canismes du cerveau – Inicea
6. Ces douleurs hĂ©ritĂ©es : le poids du traumatisme transgĂ©nĂ©rationnel – Caminteresse.fr
7. Comment un traumatisme affecte-t-il le cerveau et le corps ?
9. ĂpigĂ©nĂ©tique et traumatisme : lâhĂ©rĂ©ditĂ© en question | France Culture
A bientĂŽt pour un prochain article !
Laurence MOURLAAS â KinĂ©siologue CertifiĂ©e
